DECISION DU CSCA N° 25-14
DU 11 SAFAR 1436 (04 décembre 2014)
RELATIVE À L’ÉMISSION «شحفانين مع شادو»
DIFFUSÉE PAR LA SOCIÉTÉ « CHADA RADIO »
Le Conseil Supérieur de la Communication Audiovisuelle,
Vu le dahir n° 1.02.212 du 22 Joumada II 1423 (31 août 2002) portant création de la Haute Autorité de la Communication Audiovisuelle, tel que modifié et complété, notamment son préambule et ses articles 3 (alinéas 8, 11 et 16) ;
Vu la loi n° 77-03 relative à la communication audiovisuelle, promulguée par le Dahir n° 1.04.257 du 25 Kaâda 1425 (7 janvier 2005), notamment ses articles 3 et 9 ;
Vu le cahier des charges de la société « CHADA RADIO », notamment ses articles 2.7, 9 et 34.2 ;
Après avoir pris connaissance des documents relatifs à l’instruction effectuée par la Direction Générale de la Communication Audiovisuelle au sujet de l’édition du 18 juillet 2014 de l’émission «شحفانين مع شادو» diffusé sur «CHADA FM» ;
Après en avoir délibéré :
Attendu que, dans le cadre des missions de suivi des programmes des services audiovisuels, la Haute Autorité de la Communication Audiovisuelle a relevé un ensemble d’observations concernant l’édition du 18 juillet 2014 de l’émission « شحفانين مع شادو » diffusé sur « CHADA FM » ;
Attendu que, il ressort du constat relatif à l’édition du 18 juillet 2014 de l’émission « شحفانين مع شادو» qu’elle était dédiée à l’attaque israélienne sur Gaza et elle a permis aux auditeurs d’exprimer leur solidarité avec cette cause. Cette édition a contenu une intervention d’un auditeur qui a manifesté son soutien aux palestiniens et a précisé que cette position est dictée par référence à la religion commune et non pas eu égard au « sentiment de nationalisme et d’arabisme », qui a été présenté par l’animateur de l’émission et ce, par ce que le Maroc, comme a déclaré l’auditeur, est un « pays Amazigh » ;
Attendu que l’animateur de l’émission a répondu à l’auditeur par l’utilisation de termes comme :
" دابا واش كانت حاركاك هاد الكلمة باش تقولها ولا شنو آسّي رشيد"Ensuite, l’animateur a mis l’accent sur les termes :
"ناشط أمازيغي" ناعثا إياه ب"الصهيونية" و"الموالاة لإسرائيل" و"تلقي الأموال منها" و"العمل على زرع التفرقة في البلد"؛
Attendu que l’article 3 de la loi 77-03 relative à la communication audiovisuelle dispose que « La communication audiovisuelle est libre.
Cette liberté s’exerce dans le respect de la dignité de la personne humaine, de la liberté et de la propriété d’autrui, de la diversité et du caractère pluraliste de l’expression sous toutes ses formes des courants de pensée et d’opinion ainsi que dans le respect des valeurs religieuses, de l’ordre public, des bonnes mœurs et des besoins de la défense nationale. Elle s’exerce également dans le respect des exigences de service public, des contraintes techniques inhérentes aux moyens de communication ainsi que de la nécessité de développer une industrie nationale de production audiovisuelle » ;
Attendu que l’article 9 de la loi 77-03 relative à la communication audiovisuelle dispose que : « Sans préjudice des sanctions prévues par les textes en vigueur, les émissions et les reprises de programmes ou de parties de programmes ne doivent pas être susceptibles de :
…
- faire l’apologie de la violence ou inciter à la discrimination raciale, au terrorisme ou à la violence à l’égard d’une personne ou d’un groupe de personnes en raison de leur origine, de leur appartenance ou non à une ethnie, une nation, une race ou une religion déterminée … » ;
Attendu que l’article 7.2 du cahier des charges dispose que : « …Il veille, également, à ce que les journalistes, intervenant dans les émissions d’information, ne fassent valoir des idées partisanes. Le principe est de distinguer l’énoncé des faits, d’une part, et le commentaire, d’autre part » ;
Attendu que l’article 9 du cahier des charges dispose que : « L’Opérateur prépare ses émissions en toute liberté, dans le respect des dispositions légales et du présent cahier de charges. Il assume l’entière responsabilité à cet égard.
Cette liberté est exercée dans le respect de la dignité humaine, de la liberté, du droit à l’image, de la propriété d’autrui, de la diversité et de la nature pluraliste de l’expression des courants de pensée et d’opinion, ainsi que dans le respect des valeurs religieuses, de l’ordre public, des bonnes mœurs et des exigences de la défense nationale.
Dans toutes ses émissions, l’Opérateur veille notamment à :
…
• Ne diffuser, en aucun cas, des émissions faisant explicitement ou implicitement l’apologie de la violence ou incitant à la discrimination raciale, au terrorisme ou à la violence à l’égard d’une personne ou d’un groupe de personnes en raison notamment de leur origine, de leur sexe, de leur appartenance ou non à une ethnie, une nation, une race ou une religion déterminée » ;
Attendu que, l’utilisation de termes à connotation discriminante par le biais d’accusations directes à l’encontre d’un auditeur, suite à l’expression de son opinion, est considérée comme une atteinte au principe du respect de l’expression pluraliste des courants de pensée et d’opinion, qui se base sur l’acceptation de la différence ;
Attendu que l’animateur a tenu durant l’émission des termes comme :
" لأني أكره ذكر اسمه بشكل قاطع، يتبجح بالعلمانية ويتبجح بالصهاينة"
Qui ne permettent pas de distinguer la présentation de faits, d’une part, des commentaires et avis personnels, d’autre part ;
Attendu que l’émission a contenu des termes comme :
"لا خصنا نصلحو هاد الشي نوقفو هاد الشي، لأن هاد الشي كثر، ولاو شي منظرين وشي وحدين يعني بحكم يعني إلحادهم، بحكم أنه فكرهم المتعصب، ولاو تيقولوا شي كلام اللي خصو يترد عليه"
Elle peut être considérée comme faisant l’apologie et incitant implicitement à la discrimination à l’égard d’un groupe de personnes que l’animateur a qualifié, eu égard à ses positions, d’athées ;
Attendu que, suite à la délibération du Conseil Supérieur relativement aux remarques enregistrées à l’encontre de l’édition du 18 juillet 2014 de l’émission « شحفانين مع شادو» il a décidé d’adresser une lettre à la société « CHADA RADIO » en vue de requérir les explications qu’elle jugera nécessaire en vue d’éclairer le Conseil Supérieur ;
Attendu que la Haute Autorité de la Communication Audiovisuelle a reçu, en date du 14 novembre 2014, une lettre de la société « CHADA RADIO » par laquelle elle répond à la demande d’explications précitée ;
Attendu que la société a affirmé dans sa réponse qu’elle a pris un ensemble de dispositions, dont notamment la suspension de l’animateur de toute animation radiophonique en direct et l’arrêt de l’émission et son retrait de la grille des programmes du service radiophonique « CHADA FM » ;
Attendu que, en conséquence, il se doit de prendre les mesures appropriées à l’encontre de la société « CHADA RADIO » eu égard à ce qui précède.
PAR CES MOTIFS:
Délibérée par le Conseil Supérieur de la Communication Audiovisuelle - CSCA - lors de sa séance du 11 safar 1436 (04 décembre 2014), tenue au siège de la Haute Autorité de la Communication Audiovisuelle à Rabat, où siégeaient Madame Amina Lemrini Elouahabi, Présidente, Mesdames et Messieurs Rabha Zeidguy, Faouzi Skali, Mohamed Abderahim, Mohamed Gallaoui, Bouchaib Ouabbi, Talaa Assoud Alatlassi et Khadija El Gour, Membres.
Pour le Conseil Supérieur
de la Communication Audiovisuelle,